mercredi 14 octobre 2009

De peur que nos restes

Si jamais il restait de nous qu'un monticule d'ordure, que devrons nous laisser?  Je n'ai pour ma part pas vraiment répondu à cette question forte impertinente. Si occupé que je sois, je peux toutefois me permettre de réfléchir à ce que mon épicier me propose comme deal.  Prenant à bras le corps le virage vert, il me pousse à délaisser les sacs de plastique devenu plastica non grata que je pouvais consommer à peu de frais contre un sac d'épicerie vert et payant.
Bravo, je suis bien content de faire l'échange.  Vous comme moi, on ne peut pas être contre la vertu.  De mémoire, je me rappelle qu'il y a 20 ans mon épicier avait essayé de me faire un deal semblable, mais moins fumant.  Comme on dit, ce n'était pas gagnant-gagnant.  Il voulait me faire payer l'usage des sacs à l'unité.  Pas d'alternative, juste mon pognon pour acheter le droit de prendre un sac de plastique que je jetterais ensuite.  Oh, Bonté Divine!  Le mouvement fut tué sur le coup.

Aujourd'hui ,c'est autre chose. Je ne peux plus aller à l'épicerie sans traîner mon sac (mes sacs, pleins de sacs, toujours plus de sac écolo) et faire prendre l'air à divers logos d'organismes ou chaînes d'épicerie .  Mes co-consommateurs me saluent discrètement de la tête dans les allées, comme dans une confrérie secrète: nous on est les bons.  L'autre , le méchant, il paie 5 cennes son horrible sac, bien fait pour lui.  Les marketings vont même nous inventer bientôt des sacs écolos plus chères mais plus in, plus en couleurs, et exprimant mieux notre moi intérieur (ou notre arrogance d'être plus écolo que l'autre). On aura des classes sociales pleins nos sacs verts.

Et bien voila, une révolution en marche sous mes yeux , c'est plus que l'Octobre Rouge comme en 17, c'est l'Octobre Vert .  Mes sacs écolos vont faire baisser la consommation absurde de sac de plastique à usage unique , un dérivé du pétrole qui pourra servir à d'autres usages plus profitables (je ne peux pas dire durables, bien sûr).  À chaque usage, j'augmente la rentabilité de mon achat et je sauve la Terre.  Profitable?  Si mon sac écolo va me servir 10 ans, il va quand même rejoindre sur le monticule d'ordure les milliers de sac en plastique que les ''méchants'' ont consommés ces dernières années.  Et comme il est à base de plastique , sur un temps géologique, drôlement plus long que notre temps biologique , mon écolo de sac va prendre autant de temps pour se décomposer. (Quand ils sont enfouis, ils mettent 100 à 200 ans pour se dégrader et quand ils sont incinérés, les sacs plastiques sont la source de rejets dans l'atmosphère).


Et l'homme du XXIIIe siècle  trouvant ce sac ne pourra pas différencier en moi l'homme vert que je voulais laisser comme image, des autres l'homo detritus que je snobais.  Ah, zut , j'ai loupé quelque chose dans ma révolution verte. C'était quoi la question déja?

2 commentaires:

Yannick B. Gélinas a dit…

J'ai bien rigolé à la lecture de "la confrérie" secrète (et verte)... mais c'est vraiment juste comme considération.

Petite note: les sacs platiques prennent plutôt 400 à 500 ans à se dégrader.

François Lessard a dit…

Merci Yannick, je manquais de source pour confirmer la durée de dégradation du plastique. Si vous avez un lien à me proposer je vais le mettre en lien sur ce billet. Je suis content d'avoir réussi à vous décrocher un sourire sur un sujet somme tout sérieux. J'essaye de garder un équilibre entre un ton humoristique (sans tomber dans le sarcasme) et une critique franche du greenwashing à tout crin.